Vengeance

La semaine dernière alors que je rentrais chez moi après une dure et laborieuse journée de travail harassant — j'en fait pas un peu trop là ? — je me suis retrouvé dans un train particulièrement bondé. J'ai rapidement trouvé une place sur une banquette occupée en partie par un homme en grande discussion avec une femme installée sur la banquette opposée. Celle-ci avait soigneusement placé deux sacs assez volumineux entre elle et la fenêtre et occupait de la sorte les trois-quarts de la place disponible. L'homme me jette un regard de travers lorsque je fais mine de m'assoir sur le journal qu'il avait posé à sa gauche et reprends aussitôt sa discussion où il sera question de gamins turbulents, malpolis et en grand déficit d'éducation parentale.

Je m'installe, sors mon livre du moment et commence à lire en tentant de m'abstraire de la conversation de mes deux voisins. Le train redémarre et se dirige vers l'arrêt suivant, et nous arrivons à Versailles, où beaucoup de personnes attendent de pouvoir monter dans la voiture. Parmi les arrivants se trouve une femme qui après avoir cherché à droite et à gauche, s'approche de notre banquette, une des rares où il restait encore une place disponible et demande pardon à la femme afin qu'elle lui fasse un peu de place pour pouvoir s'assoir. Cette dernière la regarde comme si on lui avait demandé la lune, fait mine de se pousser de deux ou trois centimètres et reprend derechef sa discussion avec son compagnon de voyage. C'est tout ce qu'elle daignera faire pour répondre à la requête. N'osant pas insister, la dernière arrivée s'assiéra alors sur le quart de banquette restant et sortira un petit livret de jeu sudoku visiblement encore à la mode ces temps ci. On ne l'entendra plus.

J'ai observé ostensiblement la femme aux sacs pour voir si elle allait finalement dégager un peu de place, surtout que les portes-bagages au dessus d'elle étaient entièrement libres. Et bien non, pas de signe quelconque pour remédier un tant soit peu à l'inconfort de sa voisine qui pourtant s'était collée contre elle sous peine de tomber de la banquette. Arrivés à la station suivante, alors que j'allais lui signaler que ses précieux bagages seraient certainement bien à l'abri au dessus de sa tête et que du coup leurs conforts en allaient être grandement améliorés, elle s'est levée, a attrapé un sac dans chaque main et a commencé a vouloir se diriger vers la sortie. Malheureusement elle était plutôt encombrée et a été bloquée par mes genoux alors qu'elle souhaitait avancer dans le couloir. Ca ne passait pas, ça ne passerait pas sans une intervention de ma part. Elle s'est arrêtée, m'a lancée un regard insistant, surement pour me faire comprendre qu'il fallait que je me pousse. Je l'ai à mon tour regardée, puis sans bouger d'un iota ai repris ma lecture. Je pense qu'elle a du comprendre le message et a finalement pris son courage a deux mains, a soulevé ses deux sacs et est sortie.

J'ai relevé la tête au moment où le train repartait et j'ai croisé le regard de la femme au sudoku en train de sourire. Celle-ci s'est ensuite approprié un quart de banquette supplémentaire pour compléter son trajet puis, visiblement satisfaite de la tournure qu'avaient pris les évènements, a repris très sérieusement son loisir mathématique pour finir son trajet.

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