Peine perdue

Il y a quelques temps j'évoquais la difficulté de la prise en charge de mon fiston à l'école où il se trouve en ce moment. Je disais entre autre que je ne trouvais pas légitime de la part du corps enseignant de déjà prévoir un redoublement alors qu'il n'offrait pas toutes les possibilités pour qu'on pallie les manques dénoncés (photocopies, …).

Lundi matin nous avons une nouvelle réunion pédagogique au cours de laquelle la directrice et l'institutrice de mon fils vont appuyer leur demande de redoublement afin qu'il acquiert de la maturité et qu'il apprenne à travailler plus vite. Cette fois elles auront probablement gain de cause car depuis quelques semaines il refuse tout travail à l'école et les devoirs plus le rattrapage du travail en retard est devenu un calvaire à la maison.

Ma femme s'épuise à essayer de lui demander un effort de quelques minutes et bien entendu cela se termine fréquemment par des cris et des punitions vu le peu d'enthousiasme qu'il met à la tâche. Nous nous sommes battus pour obtenir autre chose qu'un désintéressement de la part de l'école — et il a fallu remettre ça chaque année, convaincre, briser les réticences, assurer qu'il ferait un effort de son côté. Résultat nous nous trouvons dans une situation très inconfortable.

Je reste persuadé qu'il a les capacités d'apprendre s'il est accompagné correctement — et quand je dis ça je parle du cursus normal car les alternatives ne sont pas du tout adaptées à son état ou s'il elles le sont, les places y sont extrêmement rares. Il a besoin d'être un peu plus stimulé que d'autres mais possède l'intelligence suffisante à cela, on a pu le constater à de nombreuses reprises. Je ne suis pas persuadé qu'une année où il va refaire ce qu'il a déjà vu lui permette de prendre la maturité attendue. Je ne suis pas persuadé, le connaissant, qu'il accepte de refaire ce qu'il a déjà appris sans éprouver rapidement une lassitude. Je ne suis pas persuadé que ce ne soit pas une année perdue.

J'ai le sentiment d'un gâchis formidable mais je suis conscient du peu de moyens à notre disposition pour faire évoluer les choses. Je me suis engagé dans le domaine associatif pour essayer de faire un peu évoluer la manière dont ceux qui souffrent de cette pathologie sont intégrés et acceptés dans notre société. Là aussi il faut beaucoup d'énergie pour vaincre les inerties et peu de gens sont prêts à offrir spontanément du temps pour aider, y compris parmi ceux qui sont membres des associations. J'ai vu le fonctionnement de l'intérieur et la plupart des actions menées ne sont le fait que de quelques uns, toujours les mêmes d'ailleurs.

Je suis devant un choix difficile à faire, n'ayant que peu d'éléments pour décider, ne sachant pas ce que mon fils souhaite (ou ne souhaite pas) réellement. Nous lui offrons toute l'aide possible mais cela ne suffit pas et nous goûtons la limite de notre pouvoir dans ce domaine. Dois-je parier sur cette année, une sorte de pause pour lui permettre de souffler, avec les risques que cela comporte ? Dois-je au contraire refuser absolument le redoublement, sachant que cela ne sert généralement pas à grand chose ?

Quel avenir est-il en train de se construire, quel avenir est-il en train de se gâcher, quel avenir aura-t-il ?

  • 13 De Franck -

    Ce n'est pas l'épilepsie en elle-même qui frein, ce sont les médicaments qui ont cet effet là. Je me souviens d'une personne, témoignant dans un reportage et qui avait un fils épileptique, qui disait avoir pris par mégarde l'anti-épileptique et qu'elle était restée dans le brouillard et fortement ralentie tout le week-end !

    Nous avons eu une réunion avec l'enseignante, la directrice, médecin scolaire, psycho-motricienne et psychologue scolaire ce matin, où nous avons pu partager et discuter au sujet de mon fils. Il s'avère qu'à part la directrice et l'instit, personne n'est favorable à un maintien lorsqu'il s'agit simplement de lui permettre d'intégrer une classe moins remuante. Les deux années précédentes, la classe était la même, et cela s'est bien passé. Cette année non. Je suis quasiment persuadé que l'instituteur (je précise que c'est un homme, ce qui sera probablement une bonne chose pour mon gamin) saura reprendre en main les quelques éléments perturbateurs.

    De toute les façons, il est probable qu'il passera finalement en CM1, sauf accident entre temps, et on évaluera alors l'opportunité de faire la demande d'une AVS (si le système de soutien en train d'être mis en place ne suffit pas).

  • 14 De cleanettte -

    Cette précision sur les médocs est la bienvenue je n'y avais même pas pensé: mon mari prend lui aussi ces médicaments destinés aux épileptiques occasionnellement pour calmer ses douleurs du à son amputation et il jongle sur le dosage pour avoir l'efficacité sans trop de trou de mémoire et problème de concentrations. Je comprends mieux du coups les difficultés de ton fils.

  • 15 De samantdi -

    Finalement, donc, le passage risque de se faire... Tant mieux, d'après les données que tu nous a transmises ici.

    Je dois dire que ce fil de discussion n'aura pas été inutile pour moi car dans la classe où je suis prof principal, une fille a été diagnostiquée épileptique cette année. Une forme assez légère, semble-t-il, qui se caractérise par des absences, mais qui a eu de fortes incidences sur sa vie scolaire. C'était le genre d'élève qui se faisait tout le temps reprocher d'être "dans ses rêves"... ben oui... Finalement, elle a été soignée et son traitement a eu des effets secondaires assez lourds au début.

    Maintenant va se poser la question de son redoublement, et je crois vraiment que ce ne serait pas une bonne chose pour elle. Merci de rappeler que la prise de ces médicaments est nécessaire mais pas anodine. Parce qu'on a tendance à l'oublier, finalement, et à demander beaucoup... (du coup, je vais le rappeler moi aussi à mes collègues!)

  • 16 De Thygo -

    La vie est ainsi faite, qu'aujourd'hui nous avons appris que le lycée s'opposait au redoublement de ma fille, pour lui proposer de quitter le cursus normal pour un cursus plus pratique genre BEP/CAP etc. alors que nous souhaitions tous qu'elle reste dans son lycée pour une seconde seconde afin de se reprendre et de repartir dans la course. C'est bizarre l'éducation nationale, mais comme toi, Franck, nous n'avons pas dit notre dernier mot. J'ai moi aussi appris beaucoup sur cette fameuse maladie grâce à cette note.

  • 17 De Franck -

    Je suis satisfait de voir qu'un billet peut répondre incidemment à certaines questions ! D'ailleurs, n'hésitez pas à en poser autant que vous le souhaiterez, il faut bien que ma présence au sein d'Épilepsie-France serve à quelque chose (j'exagère mais bon).

  • 18 De Franck -

    Thygo bon courage pour votre combat, je suis sûr que vous ferez pour le mieux !

  • 19 De samantdi -

    Thygo : aucun conseil de classe ne peut légalement empêcher un élève de redoubler sa seconde s'il n'a pas déjà redoublé cette classe. Là, c'est typiquement un cas où vous avez le droit pour vous.

    Bon courage, vous allez y arriver!

  • 20 De Jean-Michel -

    Franck > Je vois que la situation n'est pas encore simple. Pour ma part, j'ai redoublé pour des raisons de points pour accéder à des établissements publics et aussi parce que je n'avais pas 16 ans et que l'école est obligatoire. L'année suivante, je n'ai même pas pu accéder aux mêmes établissements. C'est pour ça que j'ai continué ma scolarité dans le privé (là, au moins l'élève est au cœur de l'enseignement du professeur et pas l'inverse).

    Ce redoublement ne m'a servi à rien, mis à part, à voir comment bien tricher. Le collège avait décidé de mettre tous les redoublements dans la même classe, ce qui fait que nous possédions les sujets et corrections de l'an passé. Ils nous été donc, très facile, de prévoir le contrôle qui allait tomber. Je précise que je n'ai jamais été un bon élève dans les matières diplômes et que j'ai souvent eu mes diplômes grâce aux matières qui font mon métier (et qui elles seules sont utiles), ce qui me rend particulièrement fière (un très joli pied de nez au système).

    Thygo > Je suis désolé, les écoles publiques devraient avoir le temps de s'occuper justement de ces élèves "en difficulté". Il me semble que sur chaque froton d'école, il y a marqué liberté, égalité, fraternité. Cela me fait toujours marrer quand les enseignants demandent plus de moyens (de quoi parlent-ils ? un professeur n'était il pas un homme/femme de savoir ? en quoi cela se concrétiseraient-ils ?).

    Comme je l'indiquais sur un précédent commentaire, je suis dans une famille de profs (je ne vous raconte pas les diners de Noël) et j'ai souvent entendu ce discours méprisant envers ces élèves. Est-ce que dans ma vie professionnelle, si un client me revient pas, je ne m'en occupe pas sous le prétexte que je n'ai pas les moyens ?

    Je vois que les enseignants pensent toujours que les BEP/CAP sont une porte d'issue pour les "nuls" (je suis diplômé d'un BEP, d'un Bac Pro et d'un BTS) alors que c'est tout l'inverse pour certaines branches. Moi qui fait de la mise en page et conception graphique, je l'ai bien vu en BTS, où on devait se payer les élèves du cursus général, ils ne rattraperont jamais les quatre années que j'ai faite auparavant (au niveau "savoir"). Et contrairement à ce qu'on pense les épreuves de BEP et Bac pro sont bien plus difficile que celles du bac général.

    Envisage cette possibilité de BEP seulement si ta fille s'oriente dans un domaine bien particulier. Je peux t'assurer que les patrons préfèrent, de loin, un(e) candidat(e) qui aurait fait le package BEP/Bac Pro/BTS que Bac Général/BTS. (je pense pour des comptables par exemple).

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