Mystère et boule de gomme

Mystère et boule de gomme, en voilà une belle expression. Les quilles à la vanille, les glaces au chocolat, en voilà de belles façons. Il y a comme cela des expressions qui signent mon enfance. je m'en rappelle de temps en temps, au gré d'une association d'idée. Souvent elles datent de l'école primaire, de la cour d'école et de ses platanes, au milieu des billes et des soldats de plomb. J'ai aimé cette époque, alors qu'être enfant était joyeux. Bien sûr il y avait les devoirs à la maison et parfois des punitions. J'en ai écrit des lignes, des Je ne dois pas …, ou alors, pour changer parfois recopié des pages entières du guide des bonnes manières ou d'un vieux livre en latin — Les hommes illustres de Plutarque, invariablement.

Il y avait encore des croix de bois, croix de fer, pour jurer sur la tête de ma mère, un secret qu'on garderait au péril de son rang. On allait même de temps en temps, mélanger son sang, justement, pour s'obliger fidélité dans le sacrement. C'était facile, on était toujours couvert d'entailles ou de croûtes en cours de séchage qu'on décollait pour l'occasion. J'en ai râpé sur le sol, surtout en culotte courte, les genoux et les paumes ont connu mille nouvelles peaux. C'était ce temps, où l'on vivait dehors quasiment plus que dedans.

Il y avait aussi, les jours de défi, des t'es même pas cap' qui fusaient et qui nous obligeaient par fierté, quand bien même on aurait été les derniers à accepter. On apprenait de cette manière à surpasser, parfois au prix d'un pantalon déchiré qui nous vaudrait pour sûr une bonne raclée. C'était le temps où les injures n'avaient pas cours comme maintenant. Merde était rare et putain interdit, on entendait parfois un petit Salaud qui invariablement faisait tourner toutes les têtes des environs. Et puis surtout il fallait se garder des surveillants à la récré, sinon c'était direct la retenue ou encore pire, chez le dirlo, une entrevue. Dans ces cas là, on était sûr d'avoir les parents qui en rajoutaient leur dose. Fallait pas qu'on puisse les soupçonner d'être moins sévères que l'école, ils avaient leur fierté !

J'entends encore les Il est amoureux, … lorsqu'on approchait de trop près une fille. On s'en gardait bien pour ne pas risquer l'opprobre, et pourtant souvent nos oreilles étaient toutes tendues pour saisir les messes-basses qu'elle s'échangeaient. C'est resté longtemps un entier mystère. Mystère et boule de gomme justement, et pourtant je n'en ai jamais mangé une seule ! Et oui, à ce moment, je préférais les carambars. Je me souviens que j'étais souvent frustrés par ces devinettes à moitié coupées sur le papier. Les quilles à la vanille, les glaces au chocolat et puis les parigots, têtes de veaux qui fusaient l'été dès qu'on disait d'où on venait, mais qui incidemment nous intronisait dans la bande pour jouer. D'une phrase on était catalogués et aussitôt on était adoubés.

Combien de mômes qu'on était alors, se souviennent aujourd'hui de tout cela ? Mystère et boule de gomme …

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