À trop vouloir combler un vide, j'ai publié ici, comme un forcené, au moins une fois par jour, pour garder une trace, pour relire que j'étais encore vivant. Plus ça ne va pas plus je publie, plus l'angoisse est là plus la frénésie me prend pour consulter et vérifier le calendrier des jours où j'ai posté sur ce blog. Comme si la seule fenêtre qui vaille était cet endroit où je verse avec prudence ce qui déborde un peu chez moi. Un jour sans est un jour où je n'existe pas.
J'ai longtemps cru que l'ordinateur était une addiction — beaucoup n'ont cessé de me le faire croire — alors qu'il constitue le lien primordial pour moi avec d'autres gens. Je me souviens avoir écrit la dessus, dire qu'en face, qu'au bout, il y avait aussi d'autres personnes qui ouvraient une petite fenêtre sur leurs vies, profitant parfois de l'occasion pour jouer un rôle, pour se vêtir des atours rêvés, pour se (re)construire un personnage. Et puis, petit à petit, au rythme des billets diffusés, la véritable personnalité ressort, presque invariablement.
Je vis dans l'urgence, l'urgence du peu de temps pendant lequel j'ai accès à l'écriture, l'urgence du temps où je peux ne penser qu'à moi, je bénis la longueur de mon trajet quotidien qui me permet de rêver et je le maudis de m'imposer d'y perdre autant de temps, du temps pendant lesquels je ne vois pas les gens que j'aime. Ce trajet qui m'oblige, ce trajet qui me force à retourner vers ce lieu où je dois lutter pour conserver un peu de raison, un peu de ce que je suis vraiment, et pour profiter de mon fils que j'aime infiniment.
Je voudrais tant pouvoir me reposer, pouvoir dire stop sans être obligé de me justifier.
1 De Bladsurb -
Billet court, mais fichtrement dense ! Ecrire un billet par jour, Madame de Vehesse appelle cela bleuir le calendrier. Pour donner naissance à soi-même ?
2 De mirovinben -
L'ordinateur peut être une addiction... Comme le besoin d'être avec ou de rencontrer des gens. Ou de s'agiter sans cesse. Faut-il s'en inquiéter ? Je n'ai pas la réponse. Ce que je sais, par contre, c'est qu'il est très sain de se poser la question et, par là même, de prendre un peu de recul.
Tes justification ? Auprès de qui ? De toi ou de nous qui te lisons ?
Publie quand tu en as envie, quand tu en éprouves le besoin ou pour rien, comme ça. Et fais confiance à tes lecteurs fidèles. Ils sauront patienter en cas de silence. Et si l'impatience se fait jour, ils pourront toujours fouiller dans les archives. Il y a de quoi faire. Et certaines pépites peuvent être passées inaperçues dans l'agitation du moment.
3 De Gilsoub -
J'ai l'impression que cela devient de plus en plus la question existentielle de nombre de blogueur. Pour d'autre raison, Tippie se posait à peu prêt la même question la semaine dernière ce qui se transformait en je ne peut plus publier tout les jours, donc je vous néglige, vous mes lecteurs, donc je me demande si je ne vais pas carrément abandonner. Pas facile de faire la part des choses entre un moyen de communication et de convivialité moderne, et l'obligation que l'on se donne de publier chaque jour... Pourquoi? pour le bien être de l'autre, du lecteurs? ou pour exister soi même? Un peu des deux peu être ;-)
4 De cleanettte -
Les blogs c'est retrouver chez les autres un peu de soi, de comportements intimes, de sentiments difficiles ou heureux. C'est un échange vraiment salutaire pour moi aussi. Je blogue beaucoups sur mon quotidien quand je suis en train de tenter de remonter une pente, si je ne blogue plus du tout c'est plutôt mauvais signe: mal-être passager ou plus profond qui émerge momentanément. Je ne me sens par contre aucune obligation vis-à vis de mes lecteurs. Fonctionnant avec un agrégateur j'estime que les autres doivent en faire autant et que donc tout comme moi ils me retrouveront avec plaisir à mon prochain article sans que mon absence au milieux de tous leurs fluxs ne se remarque de trop durant mes absences.
5 De Otir -
Il y a, à la lecture de ton billet du moins, comme un tel appel... appel d'air, appel de repos, appel d'autre chose ? Mais pouvons-nous, nous lecteurs plus ou moins inconnus répondre à cet appel ? En tous pas, par la trace d'un passage attentif, à défaut d'attentionné, et amical.
Si besoin de plus... coordonnées disponibles bien sûr...
6 De gilda -
"J'ai longtemps cru que l'ordinateur était une addiction" : ce sont ceux qui ne savent pas quel merveilleux outil (quand pourvu de l'internet) il est, qui veulent nous le faire croire, le plus souvent sans se rendre compte qu'ils se vautrent eux-mêmes des heures durant devant la télévision dont leur vie de molusques ne sait plus se passer.
Quoique pour de très assez différentes raisons, mais oui je comprends cette urgence d'écrire. On dirait que nous nous sommes croisés car j'y ai particulièrement pensé depuis 24 heures que je suis pour ma part délivrée d'un de mes poids. Et je me rends compte que l'urgence est plus forte que jamais (alors que je la croyais ces derniers temps pour partie due à l'obstacle).
Tous mes meilleurs voeux pour toi, pour de meilleurs temps et ne pas perdre en épuisements cette force qui est bonne (elle aide aussi ceux qui te lisent).
7 De Pierre Kubick -
Je sais combien, d'expérience, que vivre la différence au quotidien est pénible. On se voudrait guilleret, primesautier quand on est assommé, et de plus en plus avec le temps qui passe, par un quotidien doublement énergivore. Non seulement il faut veiller en permanence sur celui qu'on aime mais en plus il faut faire accepter sa différence aux autres, quelque fois compassionnels, indifférents dans le meilleur des cas, ou bêtement obtus voire pire encore imbéciles méchants. Et cette lutte est sans doute celle qui mord le plus, qui décape les sentiments et à l'occasion vous tord d'une rage impuissante qui s'ajoute à celle du diagnostic. Alors pour refuser l'enlisement, on photographie le quotidien, celui sur lequel on a prise et qu'on peut modifier dans une quête du Beau dans l'espace d'une liberté sensible qui permet de lever le pied, de se ressourcer, car, c'est toujours cela de pris quand on ne peut tirer de plan sur la comète ne présumant que trop, parfois à tort, du lendemain.
8 De Franck -
Je ne vais pas répondre à chacun de vous, simplement dire ici que je continuerai à écrire ici — vous y trouverez probablement du changement — mais que je ne veux plus être dépendant de la contrainte que je m'étais fixée il y a quelques années.
À tous, vous le savez déjà, j'apprécie énormément de savoir que vous me lisez, même s'il m'arrive de ne pas rendre à tout coup la pareille, et je n'ai qu'un mot à vous dire : merci.
9 De pousse manette -
Et ce qu'il y a d'extraordinaire avec internet, c'est que c'est un outil qui permet de rencontrer (en réel ou virtuel) des gens qu'on ne rencontrerait jamais dans d'autres circonstances.
10 De Kozlika -
Tout pareil que pousse manette. Pas seulement sous l'aspect de découvrir d'autres univers mais aussi parce que ces rencontres improbables apportent parfois l'apaisement au détour d'un blog ou d'un billet d'entendre un écho, souffle ténu ou cri sonore, de ces choses qu'on trouvait si bizarres en nous (ou qu'on nous disait telles), si dérangeantes, si anormales. La "fenêtre" dont tu parles dans ton billet, Franck, s'ouvre alors sur un air chargé en oxygène frais et renouvelle l'air vicié du petit monde somme toute souvent fermé de la "vraie vie" (où l'on tourne forcément un peu en rond sur les mêmes niveaux sociaux, univers professionnels et culturels que les nôtres). Pierre Kubick évoque très bien tout ça dans son commentaire fort pertinent.
Bouh, tout cet air... on en choperait presque le vertige des hautes montagnes :)
(La première personne auprès de laquelle il faut apprendre à ne pas devoir se justifier, ne serait-ce pas soi-même ?)
11 De gilda -
@ pousse mannette : même des flicques ou des conductrices de métro, c'est dire !!! :-) :-) :-)
12 De Franck -
C'est probablement l'objet de ma réflexion où, sans le dire expressément, il n'est question que de mes propres contraintes et jugements. Cela représente ma manière de lutter contre l'isolement vécu et j'ai toujours eu le sentiment qu'il ne fallait pas céder un pouce de terrain au risque de ne plus pouvoir y retourner.
J'aimais jusqu'à présent la devise hollandaise qui dit
.13 De femme -
tu as écris cela enfin je crois que c'est de toi... On mesure la valeur d'une chose au vide qu'elle laisse lorsqu'elle a disparu. Ni plus, ni moins. [ Ma pomme ]
je connais celui -ci qui veut dire un peu la meme chose...
"un jour tu comprendras peut-etre,
le prix d'un coeur qui te comprend,
le bien qu'on trouve à le connaitre,
et ce qu'on pleure en le perdant..."
14 De Franck -
C'est vrai qu'il veut dire un peu la même chose. Mais pas seulement …