Château fort

Un épisode particulièrement douloureux m’est revenu en mémoire alors que j’écrivais « La clé dans la serrure ». Bien que ne me souvenant pas de la cause de la punition qu’il m’a infligée, sur les bons conseils de ma mère d’ailleurs, j’ai encore vivace la rage que j’ai du contenir ce jour-là.

J’avais, pour un devoir d’école, ramené à la maison un magnifique château fort, construit patiemment avec des morceaux de cartons et de bois, sur une belle planche de contreplaqué, et pour lequel nous avions passé plusieurs semaines à quatre ou cinq élèves à le peaufiner, entre le découpage, la peinture, le collage, et assurer les finitions. Assurément il était devenu un bel objet et c’est fièrement que nous avons pu, chacun notre tour, ramener l’œuvre d’art à la maison pour le faire admirer à notre famille.

Heureusement, j’ai été le dernier de la bande à emporter le château et je me souviens des précautions que j’avais prises en rentrant à pied de l’école en tenant à bout de bras la planche presque trop grande pour moi. Heureusement, car mon père n’a pas trouvé mieux ce jour-là que de me forcer à le détruire, pièce après pièce, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus qu’un tas de matériaux informe sur le contreplaqué. J’avais pendant longtemps protesté, arguant de la copropriété de l’objet mais rien n’y fit. Claque après claque ma détermination a faiblit jusqu’à ce que de guerre lasse et toutes les larmes épuisées je finisse par commencer la destruction.

Je me souviens n’avoir pas osé révéler à mes copains le traitement auquel j’avais été soumis et j’ai prétexté une chute malencontreuse dans l’escalier de l’immeuble pour sauver la face. Comment avouer que j’avais personnellement détruit notre trésor, celui sur lequel nous avions passé tant de temps ?

Je cherche encore le meilleur adjectif pour qualifier cet épisode…


Initialement publié en juillet 2008

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