Sphère

Immense, occupant tout l’espace ou presque. Je suis assis à l’ombre de cette sphère dont le diamètre doit faire au moins trois fois ma taille, si ce n’est plus. Sa présence m’écrase pourtant on ne la sent pas. Ma main posée dessus à plat sent que c’est plein ou qu’alors les parois sont profondes. Un aspect de pierre, de granit presque, de métal gris foncé, de titane presque, je ne sais pas. Hors de question de la déplacer, pourtant elle repose sans support sur un sol à l’horizon infini. Une lumière blanche, presque pâle, éclaire doucement l’endroit où je me vois.

Paradoxe, je me sens à l’abri et je ne me sens pas à l’abri. À l’abri par le dessus, rien ne peut me tomber sur la tête. En danger sur les côtés, car je ne vois pas plus loin qu’une longueur de bras. N’importe quoi, n’importe qui peut surgir des deux côtés et j’angoisse à surveiller. Je suis sourd, pas aveugle, je sens la dureté de la surface bombée, j’en vois quelques nuances de gris. Pas de chaleur, pas de froid, pas de sensation de température, le temps ne passe pas pourtant il est là, défilant, les pensées suivent doucement.

Fixe, pas de mouvements, rien ne bouge hormis ma main de temps en temps qui change de place ou moi qui replace mes jambes pour soulager mon dos. L’appui sur la sphère est malcommode, désagréable, elle ne permet pas de se reposer, le dos reste courbé. La sphère appuie sur ma nuque, pèse sur mes épaules. J’ai beau tendre les bras au maximum de chaque côté, la prise est difficile à conserver.

Espoir, je sens la force revenir, je vais essayer encore. Je me sens capable de le faire et pourtant. Poser le premier pied, bien à plat, assurer. Poser le second, légèrement en arrière pour venir compenser le déséquilibre. Les genoux sont presque pliés complètement, il faut que je me recule encore, plus loin dans l’interstice entre la boule et le sol. Je plie mon dos encore et encore, je serre les fesses, mon bassin commence à devenir douloureux à force de compression, il ne faut pas que je tarde.

Victoire, les muscles n’ont pas failli, je soulève le bloc compact qui pèse sur mon dos, sur ma colonne vertébrale. Tout mon corps est dur dans l’épreuve et je sens les tendons tirer à l’extrême. Ma respiration se fait plus courte, mes poumons peinent à se gonfler et j’utilise le ventre pour compenser. Combien de temps puis-je tenir ? Combien de temps aurai-je assez d’énergie pour ne pas abandonner ? Il faut qu’ils viennent, voir, contempler, admirer et témoigner de l’exploit…

« Maman ? Viens voir, vite !
— Atlas ? Pose ce ballon et vient manger, ton père attend pour dîner !
— pffff, oui m’man, j’arrive ! »

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