Une envie, ce jour-là, de lumière, de dégradés, de monochrome, aussi parce que l’ambiance s’y prêtait particulièrement. J’ai retrouvé le plaisir de la photo ces jours passés là-bas. Laisser courir le regard et attendre la surprise d’un éclat particulier à capter sur la pellicule numérique.
Cela fait partie du travail du photographe de voir plus intensément que la plupart des gens. Il doit avoir et garder en lui quelque chose de la réceptivité de l’enfant qui regarde le monde pour la première fois ou du voyageur qui pénètre dans un pays étrange.
Bill
J’ai mes jours sans et mes jours avec et comme je dis souvent, contrairement aux photographes professionnels, je n’ai aucune autre obligation de résultat que celle que je me fixe de temps en temps. C’est très confortable et agréable.
Alors je déambule, l’appareil pendant le long de ma hanche, solidement fixé à la sangle qui traverse le torse. Parfois je dégaine, tel Billy the kid, au moment du duel, mais en beaucoup plus lent puisque le temps j’en ai devant moi.
Parfois un détail accroche, ou un endroit qui soudain, alors que j’étais passé par là mille fois, déclenche quelque chose d’inhabituel en moi. Un reflet, une ombre, une perspective, c’est très diffus mais présent.
Je m’accroupis de temps en temps, parce que j’aime cette vision du haut comme trois pommes qu’ont les enfants, où le monde paraît mille fois plus grand…
Et puis je me fais oublier, de tout et de tous, pour capter silencieusement et discrètement, celle qui se prépare à aller surfer, celui qui déplie sa voile ou encore ceux avec leurs seaux et leurs pelles vont à la pêche aux coquillages.
Un nouveau tag sur le vieux bunker que j’enregistre parce qu’il ne sera plus là dans quelques mois, comme le piège à cauchemar qui n’aura pas survécu aux tempêtes d’avant l’été.
Traces de pas, légères, à peine marquées…
…un galet, isolé.
La ribambelle bruyante et agile passe au loin, pleine de clameur, de cris, de grands gestes et de pas rapides ; les vagues sont au rendez-vous, il est temps d’aller les chevaucher.
Courir, pour se jauger ou pour jouer…
…ou bien construire et inventer.
J’ai marché longtemps et doucement ce jour là sur le sable blanc de la baie d’Audierne et j’ai pris un grand bol d’océan !
Vous vivez dans un univers ; vous formez des images de cet univers tel qu’il vous apparaît. Et de cet univers, vous ne connaissez rien excepté les images. Mais les images de l’univers qui sont à l’intérieur de vous ne sont pas cet univers…
A.E. , La Faune de l’espace