Je me souviens encore, mais sans trop d’images dans mes souvenirs, de celui qui avait pris le temps de me former, lors de ma première mission, tout jeune et fraîchement embauché dans une SSII. Les bonnes façons de réfléchir et de faire, de la méthode, de prendre du temps, de documenter et de tester, … Une année — un peu moins en fait — où j’ai appris le métier, comme un apprenti ; j’avais conscience, peut-être erronée mais en tout cas vraie pour moi, d’avoir un privilège de pouvoir m’assoir devant un clavier et de programmer !
Cette conscience je l’ai conservée depuis et même si j’ai oublié son visage, je me souviens encore de fragments de geste devant l’écran, lui assis à côté de moi, me laissant le soin de taper sur le clavier. Comme une photo légèrement assombrie mais dont un coin, en bas à gauche, resterait encore lisible, avec deux mains et un clavier.
J’ai eu comme ça, tout au long de ma vie, pas encore finie, mais déjà pas mal avancée, l’heur d’avoir eu des rencontres qui marquent, qu’elles soient réelles ou virtuelles — ce qui pour moi ne fait finalement aucune différence, il y a toujours quelqu’un de l’autre côté —, comme celui qui un jour, alors que je n’osais pas proposer mon code m’a répondu : « Qu’est-ce que tu risques ? » ; eh bien finalement pas grand chose eu égard au bénéfice que j’en ai tiré depuis.
Comme ce jour alors que j’étais en Israël, dialoguant avec un responsable d’un groupe qui partait à Jérusalem (nous étions dans un kibboutz en Galilée) ; je ne sais plus qui m’avait alors convaincu de parler directement en anglais — que j’étais loin de savoir maitriser — plutôt que de passer par lui pour faire la traduction en hébreu :
Le responsable :
— Why do want to come with us?
moi, sans me démonter, avais répondu dans la foulée :
— Why not?
ce à quoi il avait répondu Ok, avec un éclat de rire.
Et puis ce sourire au milieu d’une foule impressionnante pour moi qui débarquais là pour une première fois ; ce « That’s it! » de quelqu’un que je tiens comme référent à propos de ce que j’avais écrit dans un de mes textes d’alors, que je tenais pour très banal, a minima ; ou bien encore celui qui m’a convaincu d’aller affronter ma peur des examens et des remises en question qui me vaut aujourd’hui de m’éclater en moto !
Je note qu’à chaque épisode marquant j’étais à la frontière de ma zone de confort et hésitait à en franchir la limite…
Ai-je été, au moins une fois, de l’autre côté ? Ai-je marqué ou influencé le choix d’autrui ? Eh bien, aucun souvenir flagrant ne remonte à la surface, à moins que cela reste sous le radar de ma propre conscience, allez savoir ! Il faut dire que ça me chagrinerait un peu, même si ce n’est pas volontaire de ma part, que d’avoir pris autant sans rien donner en retour.
Mais la réalité tout entière est un jeu. Dans ce qu’elle a de plus fondamental, la physique – le tissu même de notre univers – résulte directement de l’interaction de certaines règles passablement simples et du hasard.
Iain , L’homme des jeux
1 De Stéphane Deschamps -
Tu laisses des traces mais tu ne les vois pas forcément. Pas des moindres avec dotclear, par exemple ; ou avec ta sale manie de publier un article par jour, qui, au choix selon les jours, nous file des complexes ou nous motive.
Et je ne parlerai pas des photos de gens, qui sont une leçon à chaque fois (comme celles de quelques autres que je suis de loin sans qu’ils ne le voient trop).
Voilà voilà.
2 De samantdi -
Comme Stéphane Deschamps a raison !
Il y a quelque chose en toi qui est de l’ordre de “l’endurance” et qui m’a permis de surmonter des moments pas très gais de ma vie, sans que tu aies dit ou fait quelque chose, simplement parce que tu étais là.
Et je ne crois pas t’avoir dit MERCI pour ça, Franck, alors je le fais aujourd’hui, ce texte m’en donne l’occasion.
3 De Tomek -
Je ne saurais dire mieux que les brillants témoignages précédents l’influence positive que tu peux laisser, par tes publications (j’y inclus les photos), par ton implication sans faille dans Dotclear, et bien d’autres choses pas forcément tangibles…
4 De Noé -
Je dirai aussi : si tu n’étais pas quelqu’un d’important dans nos vies, Lomalarchovitch aurait un autre parrain 😜
5 De Franck -
Merci beaucoup, à tout ceux qui se sont exprimés ici et sont qui sont passés silencieusement.
Je crois que j’ai été un peu maladroit dans ma formulation, en tout cas en ce qui concerne le dernier alinéa. Je ne voulais en effet pas tirer la couverture à moi et solliciter mes lecteurs, mais plutôt faire état de mon questionnement présent à propos de l’influence qu’on peut avoir sans en être particulièrement conscient.
Cela étant, comme disait Jacques Dutronc, « La modestie est l’art de se faire louer une seconde fois. » :
— Vous êtes le/la meilleur·e dans …
— (modeste) Mais non, je vous assure !
— Mais si, mais si !
Donc ne vous méprenez pas, tout ça me fait très plaisir !
6 De catherine -
Quand je lis ce blog, j’apprends toujours quelque chose. Bon, je suis dépassée côté informatique, et la Bretagne, je ne la connais pas. Mais pour le reste, la profondeur des textes me faire réfléchir, comme aujourd’hui. C’est un bel espace de lecture et d’échanges, même si cela restera dématérialisé me concernant.