Lonesome devboy

Source : Bhakti Iyata, https://pixabay.com/fr/users/Bhakti2-387310/

Crédit photo : Bhakti Iyata

« Lonesome devboy », voilà un titre de conférence tout trouvé pour décrire la vie de celle ou celui qui maintient une application open-source, souvent seul·e dans son coin, et je suis persuadé qu’il y en a bien plus qu’on ne le croit !

On me taquine sur Twitter pour que je présente un sujet à ce sujet, justement, mais ça nécessiterait un peu plus de travail qu’un simple titre et franchement je ne suis pas convaincu que ce soit très demandé ; à mon sens ça serait mieux du côté d’une conférence sur le logiciel libre par exemple, et encore.

Avec l’expérience, je finis par avoir une bonne idée des différents sentiments qui traversent la tête de ces lonesome devboys — j’évite l’inclusif ici pour faire un clin d’œil à une BD assez connue —, allant de l’enthousiasme le plus béat, avec l’envie de conquérir le monde qui va avec — genre « on va bouffer Wordpress » —, jusqu’au découragement le plus profond et l’envie d’envoyer tout balader — hop, hop, hop, un petit 42[1] —.

J’en connais aussi les risques, en particulier celui de ne pas avoir d’yeux externes, de critiques, voire même de simples débats sur l’opportunité de faire ou de ne pas faire, sur l’avantage de telle méthode plutôt qu’une autre, sur le choix de telle technique, …

Décider seul est parfois lourd de conséquences, surtout, et je pense que c’est aussi fréquent, quand on transporte son syndrome de l’imposteur sur l’épaule, toujours bien présent lui, même si avec le temps on a appris à ne lui céder qu’un tout petit peu de place.

A contrario, c’est aussi une vraie liberté ; on code ce qu’on veut, ce dont on a besoin et on peut sans vergogne envoyer balader tout ce qui ne nous plaît pas ! On peut se former sur des technos qu’on ne maitrise pas bien, pour les utiliser ensuite, virer les vieilleries qui traînent — je finirai un jour par dégager jQuery, par exemple. Et pendant ce temps les outils s’améliorent, en particulier les navigateurs avec des possibilités autrefois apportées par des librairies parfois lourdes, aujourd’hui nativement shippées dans leur moteur. Ça ouvre plein de possibilité et c’est ultra cool, enfin moi je trouve.

Parce que je ne vous ai pas non plus tout dit. Je suis un vieux développeur, un dev senior comme on dit et je n’ai plus une plasticité du cerveau aussi performante que les tout jeunes qui déboulent maintenant ; n’empêche que jusqu’à ce jour, je tiens à peu près la route, ce qui est en soi plutôt gratifiant.

Et puis, de temps en temps, on a des petites satisfactions, comme celle du jour où celui qui a créé l’application que je maintiens m’a posé une question sur celle-ci ; je finis par en savoir plus que n’importe qui d’autre sur cette planète à ce sujet.

Sauf que !

Sauf qu’il y a un bus factor égal à 1 ; vous voyez où je veux en venir, surtout si vous avez suivi la conférence d’Hellgy à ce sujet et c’est dangereux.

Et puis maintenir seul implique un degré d’implication qui va bien plus loin que la simple contribution, a minima pour ceux qui souhaitent léguer quelque chose qui « tienne la route ». Ça veut dire être encore plus rigoureux sur la qualité du code — je ne compte plus le nombre de fois où j’ai balancé quelques jours de développement parce que je ne trouvais pas ça assez propre, élégant —, ne pas renâcler à documenter le plus intelligemment possible ce qu’on fait, en ayant en tête celle ou celui qui, un jour, reprendra le flambeau, si jamais ça arrivait (et puis c’est une question de fierté, en tout cas pour moi).

Ça veut dire aussi savoir faire l’impasse sur les domaines de compétence qu’on ne maitrise pas. Par exemple je ne suis pas designer, ni intégrateur, encore moins expert UI voire UX, même si j’essaie de faire de mon mieux. Idem pour l’accessibilité, idem pour les traductions — je bavasse l’engliche, quant au reste…

Sans oublier qu’il faut gérer l’infrastructure de développement (heureusement j’ai encore de l’aide pour ça), l’architecture qui va avec, assurer le support pointu quand c’est nécessaire…

C’est passionnant mais c’est très éloigné (et je l’ai déjà dit ici-même) de l’esprit que j’ai découvert quand j’ai intégré l’équipe il y a quelques années.

Voilà, un peu de vrac, rien de bien construit et loin d’en faire une présentation qui soit attrayante ; alors je vais retourner à mon code — j’ai des tas de trucs cools sur ma ToDo —, à mes tests unitaires, à ma doc, à mon métier en quelque sorte…

♪♬
I am just a lonesome devboy
And I developping all alone
♫♬♪
I ain’t even got a keyboard
To fix a bug in the code
♪…

Note

[1] Ceux qui savent, savent !

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