007_New1

Dans mon enfance, nous changions de ville tous les quatre ans. Mes parents avaient choisi une maison de ville, la tapisserie qui en recouvrait les murs, les fleurs de l’étroit jardin ombragé. Impatiens. La maison avait été partagée autrefois en deux appartements, et notre quatuor serré nageait large dans l’espace reconquis. Deux cuisines dont une obsolète, deux salons dont un seul meublé, deux sonnettes à la porte aux sons très différents… Tout était à nous. Seul le grenier restait scindé en deux parties égales, matérialisées par une cloison faite de planches verticales espacées de la largeur d’une main. Une porte de même facture et sa serrure permettaient d’accéder  au grenier interdit, celui des propriétaires. Ma mère avait entreposé de notre côté quelques malles, un baril de lessive dans lequel sa robe de mariée restait comprimée. Un ou deux matelas roulés à même le sol. Nous nous vautrions dessus en riant de nos bons coups. Une cible et des fléchettes nous occupaient  dans sa pénombre poussiéreuse. Il y avait au sol une dalle de verre dépoli épais, seule source de lumière pour la salle de bain céladon du premier étage. Ma mère nous sommait de l’éviter.  J’ai tenté quelques petits sauts, évidemment. Sa transgression à elle, c’était de tourner la clé du grenier d’à côté et d’aller contempler les objets dans la pénombre. De vieilles choses, quelques poignées de porte en porcelaine, des cuivres, un pichet de toilette en faïence et son bac.