Pour la première fois, ce soir, l’enfant de dix ans qui vit cachée dans mon corps d’adulte, oui l’enfant a dit tout haut qu’elle en avait marre de voir ce qu’elle est devenue.
J’aime la chemise en lin que tu portes en juillet, les tablettes Hollywood à la chlorophylle. Poudrées de sucre glace. Les paysages de campagne l’été, quand le ciel est grisâtre.
Tout ce vert.
J’aime l’eau stagnante des rivières assommées par la sécheresse. Le poids des lentilles à la surface. Le passage d’une barque. La couleur des yeux délavés de ma mère. Oui maman, on peut souhaiter mourir pour un chagrin.
Tout ce glauque.
J’aime la tasse vert sombre brisée la première fois que tu m’as fait du thé. Et surtout j’aime que tu l’aies réparée.
J’aime ce céladon dont nous adorions la nuance ensemble.
Que nous adorons encore chacun de notre côté.
(Nous ignorions le sens second de cet obsolète. C’est mieux ainsi.)
(céladon : avec ironie, amant délicat et langoureux)
